Rêve

Psychologie

Désigne l'activité imaginative lors du sommeil (à 80% lors du "sommeil paradoxal", SP, voisin de l'éveil), avec illusion d'une réalité vécue.

L'inscription du rêve dans le sommeil (par opposition à la rêverie et aux autres "états de conscience modifiés"), ainsi que la découverte neurophysiologique du SP (Kleitman, Magoun), ont fait du rêve la cible d'une tentative exemplaire de réduire l'activité imaginative du rêve (culturellement chargée de sens) à l'épiphénomène d'un phénomène cérébral. Le rêve serait l'activation aléatoire du raphé médian (et d'autres régions du pont et du bulbe), laquelle serait cause des mouvements oculaires rapides (MOR) (Jouvet) et qui, à l'encéphalographie, coïnciderait avec des salves ponto-géniculo-occipitales (PGO) (Jeannerod). La neurobiologie exacte des faits est encore en débat. Mais elle renouvelle déjà la problématique de l'idéation onirique, marquée au 19ème siècle par l'associationnisme (Maury), sur deux points cruciaux: 1. si les salves PGO sont aléatoires, il est difficile d'imaginer un plan, et donc une intentionnalité sémantique interne dans l'activation des centres corticaux visuels et de l'amygdale, à la base des images du rêve; 2. La destruction du locus coeruleus permet d'objectiver, chez le chat, des actions spécifiques de son espèce (comme l'attaque d'une souris fictive), dans la mesure où sa motricité n'est alors plus inhibée lors du SP. Ce qu'on voit en rêve, ce serait donc ce qu'on ferait si l'on n'était pas endormi.

Or Freud, s'il supposait déjà que le rêve remplaçait l'action, défendait la cohérence du sens du rêve, malgré les déformations.

L'étude expérimentale du rêve chez l'animal se heurte au problème du récit de rêve chez l'homme, pour qui l'illusion d'avoir personnellement vécu ce qu'il a rêvé vient au premier plan. La cohérence de certains récits est-elle un artefact dû à l'éveil du narrateur? Le "rêve lucide", enfin, où le rêveur a conscience qu'il rêve mais ne se réveille pas, laisse penser que des phénomènes intentionnels se déroulent en rêve. Or, comme l'a remarqué Malcolm, dire "Je rêve" est normalement aussi impossible que dire "Je suis mort": le jeu de langage du récit de rêve ne permet donc pas de donner pleine valeur d'actualité (typiquement liée à l'indicatif présent) à des énoncés comme "Je perçois, ou je crains, A, en rêve". "Rêve" cérébral et rêve "à raconter" semblent ainsi mal s'ajuster.

Psychanalyse

Jouvet M., Le sommeil et le rêve, Paris, 1992.

Malcolm N., Dreaming, Londres, 1959.