Séminaire au Centre d'études du vivant

L'action: "chaînon manquant" entre biologie et psychologie?

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(3) La naturalisation de la croyance: de la psychologie animale à la biologie de la pensée?

(année 2001-2002)


Le séminaire de cette année évolue non dans sa forme mais dans ses objets. Je voudrais peu à peu passer de l'étude critique de la tentative indirecte de construire une théorie naturalisée du mental par le détour du concept d'action, à l'assaut direct sur le coeur du mental, les croyances. Le lien entre biologie et psychologie (avec, à la clé, l'éventuelle réduction épistémologique de pans importants de la dernière) s'opère donc ici sur la base des opérations nécessaires pour assurer la continuité fonctionnelle et téléologique des conduites observées. Car il est difficile d'imaginer que des organismes complexes peuvent agir sans stabiliser les intentions qui les guident dans des formats représentationnels orientés sur des objets, qu'il faut bien appeler des croyances: si un chien va chercher un os de l'autre côté du mur où je l'ai lancé, c'est qu'il croit qu'il y est. C'est d'autant plus étrange que les animaux sont supposés ne pas disposer du langage.

Dans un premier temps, la naturalisation des croyances n'est pas indépendante de la théorie de l'action comme adaptation régulée au milieu environnant, dont on a examiné plusieurs versions les années précédentes. Mais elle s'en émancipe aussi dans la mesure où le traitement interne de l'information, apparemment nécessaire pour comprendre comment les organismes calculent, optimisent, et déclenchent les actions adaptatives, peut faire appel à des représentations formelles sophistiquées, dont les modèles sont empruntées à la logique ou à l'informatique. Une certaine version du cognitivisme, explicitement anti-béhavioriste, a ainsi capitalisé sur l'échec à penser ce qui se passe entre l'input perceptif et l'output moteur, en exploitant l'idée d'un moteur mental traitant les informations pour structurer le comportement; ce sont ces informations structurées, capables d'intentionnalité, qui constituent des croyances, ou du moins, des proto-croyances.

Mais sommes-nous vraiment contraints de faire des hypothèses fortes sur l'architecture cérébrale où ces calculs sont implantés? Quel type de rationalité évoquons-nous quand nous parlons de croyances et d'actions motivées causalement par ces croyances? Comment peut-on parler de "causalité mentale" des croyances? Et ce que nous appelons quotidiennement des croyances, au niveau humain, est-il éclairé si peu que ce soit par des modèles animaux?

Je mettrai donc à l'étude trois livres qui soulèvent de façon philosophique argumentée la question de savoir si et en quel sens la psychologie animale permet de biologiser la pensée, ou bien qui situent les enjeux d'une telle tentative pour les humains, leur idée de la raison et du langage: